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L'actu Verte
30 mars 2010

Les serveurs informatiques, très très gourmands en énergie

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On ne va pas se mentir : en étant un site Internet d’informations, notre bilan carbone va être plombé, entre autres, par les serveurs informatiques. En fonctionnant 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ils sont particulièrement gourmands en énergie. Et sans ces petites machines qui stockent et distribuent nos pages Web, LeMonde.fr n’existerait pas.

Nous devons donc identifier leur consommation électrique ainsi que celle utilisée pour leur climatisation. Une petite vingtaine de nos serveurs sont dans notre immeuble et servent à gérer notre Intranet. Une autre petite vingtaine sont hébergés dans un centre de données - datacenter - appartenant à Iliad, maison-mère de Free, à Vitry-sur-Seine. Ils servent principalement à gérer le trafic abonnés, les blogs, les newsletters et les forums. Le reste de notre trafic est supporté par une société américaine, Akamaï, un “content delivery network” à qui on achète de la bande-passante. En gros, nous utilisons leur réseau mondial de serveurs qui nous permet de gérer les aléas du trafic, notamment lors de gros pics de connexions comme lors d’un 11-Septembre. Voici comment ça fonctionne :

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S’il est facile de calculer la consommation de nos propres serveurs, il est donc plus difficile de connaître celle des machines que l’on utilise chez Akamaï. Mais cette société étant elle-même dans une démarche similaire à celle du bilan  carbone, nous devrions pouvoir obtenir satisfaction. En leur fournissant la répartition mois par mois de notre trafic par pays d’origine pour 2009, ils devraient être en mesure de nous fournir les données nécessaires en tenant compte du type d’énergie utilisée dans chacun des pays.

A l’image d’Akamaï, les sociétés du secteur commencent à s’intéresser aux questions énergétiques. En France, il existe environ une centaine de gros datacenters qui peuvent  abriter plusieurs milliers de serveurs, appartenant ou non à  la même société (acteurs du Net, opérateurs de téléphonie mobile,  centres de recherches, grosses entreprises…).

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Ces centres sont énergivores car non seulement les serveurs consomment de l’énergie pour fonctionner mais il faut aussi les refroidir pour éviter les pannes. Dans un datacenter, un tiers de l’énergie sert à la climatisation, un tiers à l’amélioration de la qualité de l’électricité qui arrive du fournisseur et le dernier tiers à l’alimentation même des machines. En se basant sur une étude européenne, Alain Anglade, chargé à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) des actions d’efficacité énergétique des technologies de l’information et de la communication (TIC), estime que les datacenters consomment en France environ 4 Terawattheures (Twh) par an, soit 1 % de la consommation totale d’énergie hexagonale. “Et encore, c’est une estimation basse : l’étude Efficient-Servers date de 2007, soit avant l’arrivée du ‘cloud computing’ [l’utilisation de logiciels et services hébergés à distance, comme ceux de Google document] et des smartphones”, précise-t-il.

panneau.1269609898.jpgIl est donc urgent pour les datacenters de s’attaquer à leur consommation énergétique. “Si le facteur énomique reste principal, les boîtes commencent à avoir  des préoccupations énergétiques, note Alain Anglade. Certains facturent même le  coût énergétique. Je ne serais pas supris que ce soit une tendance qui se  développe au fil des années.”

D’autant que le parc actuel, construit il y a 15 ou 20 ans, est aujourd’hui de plus en plus inadapté, selon Christian Grellier, directeur des systèmes d’information du promoteur  Bouygues Immobilier et président du groupe de travail sur les  datacenters du rapport  Detic   (Développement éco-responsable et TIC),  remis en 2009 à  Christine Lagarde, ministre de l’économie. “Désormais, pour 1 Kwh consommé par un serveur, il faut dépenser un autre Kwh, au moins, pour dissiper la chaleur. Et les technologies de refroidissement classiques sont poussées aux limites de leur capacité”, écrivent les auteurs de l’étude Detic.

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Il existe des solutions   pour réduire la facture énergétique des datacenters. En agissant d’abord à la source : le serveur. “Un watt économisé sur un processeur induit par exemple une économie totale de 2,84  watts”, indique Alain Anglade. “Différentes options techniques sont déjà disponibles pour améliorer la performance énergétique des serveurs telles que des composants matériels à haut rendement, des systèmes de gestion énergétique ou des solutions logicielles comme la virtualisation”, souligne l’étude Efficent Servers. Autres pistes envisagées : le système de free cooling, qui consiste à utiliser, quand les conditions climatiques le permettent, l’air extérieur pour refroidir les machines. Ou encore celui d’allées froides et chaudes qui offrent la possibilité de mieux  diriger l’air froid.

“En fonction du service fourni par les  serveurs (…), il est possible d’atteindre entre  20 et 70 % d’économies”, note l’étude européenne Efficient Servers. Alain Anglade ajoute la nécessité de travailler sur d’autres indicateurs. Il existe bien le Power Usage Effectiveness (PUE), qui consiste à diviser la consommation énergétique totale du datacenter par celle des serveurs, mais les experts estiment qu’il n’est pas suffisant. “Dans ces analyses, on ne tient pas compte pour l’instant de l’empreinte carbone du datacenter, y compris celle de la totalité des équipements entrants dans la composition du datacenter et celle liée à sa déconstruction et à son recyclage”, confirme l’étude Detic.

orangejpg.1269608776.jpg C’est d’autant plus urgent que le marché des datacenters est en pleine expansion : dématérialisation des procédures administratives (déclaration d’impôts), déploiement des smartphones, généralisation du e-commerce et du e-banking ou encore développement du travail nomade. “Entre 2002 et 2008, le nombre de serveurs vendus a quasiment doublé, confirme Alain Anglade. Et ça ne devrait pas s’arrêter là !”

Une croissance que les auteurs du rapport Detic aimeraient transformer en “arme stratégique de compétitivité nationale”. Dans leur rapport, ils recommandent en effet aux pouvoirs publics d’inciter les gros hébergeurs à s’implanter en France, via des incitations fiscales et des simplifications administratives. La spécificité de l’énergie française figure également en bonne place. “Une production d’énergie électrique à 80 % d’origine nucléaire, par conséquent peu émettrice de CO2, souligne le rapport.

Selon l’Ademe et Réseau de transport d’électricité (RTE), quand la consommation électrique française représente en moyenne 75 g de CO2/Kwh, celle de l’UE des 27, à base de charbon, représente 370 g de CO2/Kwh. “La France s’est dotée d’une indépendance énergétique, il faut maintenant qu’elle se dote d’une indépendance numérique, fait remarquer Christian Grellier. Si on ne les incite pas à venir en France, ces entreprises iront en Belgique ou en Irlande. Toutes les données sensibles  de la France seront alors hébergées à l’extérieur du pays.”

Raphaëlle Besse Desmoulières

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Commentaires
C
Article pertinent sur la consommation des serveurs et des datacenters. Ces derniers sont de plus en plus sensible à leur consommation d'énergie et des actions concrètes sont entrain de voir le jour.
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