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L'actu Verte
3 mai 2010

Washington somme BP de redoubler d'efforts face à la marée noire aux Etats-Unis

Face à l'aggravation de la marée noire qui a triplé de superficie dans le golfe du Mexique, l'administration Obama a décidé de geler son plan de relance des forages pétroliers offshore, annoncé le 1 er avril. En considérant l'escalade des dommages écologiques, BP, qui dispose d'un lourd passif aux Etats-Unis, aura du mal à restaurer son image.

Le spectre de l' « Exxon Valdez » hante les côtes du golfe du Mexique. Près de deux semaines après l'explosion de la plate-forme « Deepwater Horizon », le 20 avril, Barack Obama s'est rendu hier sur place pour constater l'ampleur de la marée noire _  « une catastrophe environnementale massive et potentiellement sans précédent », selon le président américain _ qui touche désormais les côtes de la Louisiane. La nappe de pétrole a triplé de superficie en deux jours pour atteindre 10.000 km 2

L'état d'urgence a été décrété dans les Etats directement menacés : Louisiane, Alabama, Mississippi et Floride. Face à la montée des critiques sur le manque de réactivité de l'administration _ ce qu'a démenti Obama _ et aux doutes sur l'efficacité des mesures prises par BP, Washington a sommé le groupe pétrolier de redoubler d'efforts. « BP est responsable, BP paiera », a fait savoir le président.                  

Une fuite de 5.000 barils par jour

                   « Il est clair qu'après plusieurs tentatives infructueuses pour colmater la source de la fuite, il est temps pour BP de renforcer sa mobilisation afin d'endiguer la marée noire », avait préalablement souligné la secrétaire américaine à la Sécurité intérieure, Janet Napolitano. Barack Obama a aussi annoncé un gel préventif des forages offshore. Les autorités ont d'ailleurs ordonné hier l'arrêt de 2 plates-formes dans le golfe du Mexique, une autre ayant été évacuée, à titre de précaution. « Nous avons mis en oeuvre l'effort de réponse le plus massif jamais utilisé jusqu'ici dans un cas de ce genre », a assuré samedi Doug Suttles, le directeur général de l'exploration et de la production de BP, le groupe pétrolier britannique dont la responsabilité est mise en cause.

Après une tentative de mise à feu partielle, plus de 84 kilomètres de barrages flottants ont été déployés et quelque 11.400 litres de produits chimiques dispersants ont été répandus pour tenter de « briser » la nappe. Mais, faute d'avoir réussi à colmater la fuite sous-marine, le flot de pétrole déversé est désormais estimé par les autorités à 5.000 barils par jour. A ce rythme, la marée noire pourrait atteindre, dès la troisième semaine de juin, le niveau record de la catastrophe provoquée par le naufrage de l'« Exxon Valdez », qui avait déversé 40.000 tonnes de pétrole brut, en 1989, sur les côtes de l'Alaska. Or, les experts ne sont pas très optimistes sur les chances de colmater la fuite à court terme. De l'aveu même de BP, les travaux de forage de deux puits de secours destinés à enrayer la fuite devraient prendre de 60 à 90 jours. Les robots sous-marins déployés n'ont jusqu'ici pas réussi à actionner la valve de sécurité à la tête du puits. Le seul espoir reste la mise en place par BP de trois entonnoirs inversés, destinés à couvrir le puits, ainsi que deux autres fuites et à pomper le pétrole. Mais là encore, les travaux de raccordement à un navire devraient prendre deux à quatre semaines.

                   « Les trois défis auxquels nous sommes confrontés sont d'arrêter la fuite, de protéger nos côtes et de préparer un nettoyage rapide des zones touchées », a déclaré samedi le gouverneur républicain de la Louisiane, Bobby Jindal. Il a également critiqué BP pour l'insuffisance des moyens déployés. Mais certains observateurs estiment que le gouvernement fédéral a lui-même tardé à prendre la mesure de la catastrophe en la déclarant officiellement « désastre de dimension nationale » jeudi dernier seulement. « Nous assumons l'entière responsabilité de la marée noire et du nettoyage et, chaque fois que quelqu'un présentera des requêtes légitimes pour des dommages, nous les honorerons », a déclaré le PDG de BP, Tony Hayward. Depuis l'entrée en vigueur de l'Oil Pollution Act de 1990 adopté dans la foulée de l'« Exxon Valdez », les pétroliers sont d'ailleurs obligés de faire financièrement face à leurs responsabilités. Jusqu'ici, le niveau estimé des dépenses de BP pour enrayer la marée noire s'élève à 6 millions de dollars par jour _ un chiffre qui augmentera lorsque le pétrole touchera les cotes _, et avec le renfort de l'armée américaine, quelque 2.000 personnes et 50 bateaux ont été affectés aux opérations.

Une facture de plusieurs milliards

Mais, selon les analystes, face à l'escalade des dommages écologiques, la facture du désastre (y compris les conséquences juridiques) pourrait aisément atteindre plusieurs milliards de dollars pour la compagnie BP. Lors de la catastrophe de l'« Exxon Valdez » en 1989, le groupe américain Exxon avait dû faire face à une facture de 2 milliards de dollars pour le nettoyage, sans compter les 800 millions de dollars de dommages-intérêts.

Pour l'administration Obama, la priorité est d'éviter le « spectre » du cyclone Katrina dont la gestion désastreuse par l'administration Bush avait été très critiquée en 2005. A plus long terme, le président a dû mettre un bémol à son plan de reprise des forages offshore à partir de 2012, annoncé le 1 er avril, pour mieux assurer l'indépendance énergétique américaine. Selon les chiffres du département de l'Intérieur, le puits de BP figure dans une zone du golfe du Mexique qui assure 30 % de la production domestique américaine. Face à la catastrophe, le président a précisé, ce week-end, qu'aucune nouvelle autorisation de forage ne sera délivrée avant un « examen complet » des causes de l'explosion de la plate-forme de BP et l'adoption éventuelle de nouvelles normes de sécurité.

L PIERRE DE GASQUET, Les Echos

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